Le parquet de Paris a élargi en décembre l’enquête sur le spectaculaire incendie de l’usine Lubrizol et des entrepôts de Normandie Logistique à Rouen. Il met en avant des manquements à la sécurité de la part des deux entreprises.
Trois mois après le spectaculaire incendie de l’usine Lubrizol et des entrepôts de Normandie logistique à Rouen, le parquet de Paris a élargi l’enquête, en décembre dernier.
Selon lui, des manquements de sécurité de la part des entreprises auraient bien été observés.
Dans un réquisitoire supplétif, le parquet a officiellement demandé aux juges d’instruction, qui enquêtent sur l’origine de l’incendie du 26 septembre, d’élargir leurs investigations à une série d’irrégularités dans l’exploitation des deux sites « ayant porté une atteinte grave à la santé, la sécurité, ou dégradé substantiellement » l’environnement. Les procès verbaux sont été dressés en ce sens le 19 décembre dernier.
La suite logique de la procédure
Cette demande constitue en fait l'étape suivante de la procédure judiciaire engagée le 29 octobre dernier.Les enquêteurs du Srpj de Rouen, de l'Office Central de Lutte contre les atteintes à l'environnement et la Santé Publique (OCLAESP) et de l’Institut de Recherche Criminelle de la Gendarmerie Nationale (IRCGN) avaient alors clôturé l’enquête ouverte à la suite des faits survenus le 26 septembre 2019 sur la commune du Petit Quevilly (76).
Celle ci avait donc été remise au procureur de la République à l’issue d’une réunion organisée le 29 octobre dans les locaux du pôle santé publique du parquet de Paris.
Depuis cette date, trois magistrats du pôle santé publique du tribunal de Paris sont donc chargés d'une large information judiciaire, ouverte notamment pour "mise en danger de la vie d'autrui", "blessures involontaires" et "destruction involontaire par incendie".
Si l'enquête a été ouverte contre X, et doit encore déterminer la responsabilité de l'origine de l'incendie, ce réquisitoire supplétif, dont le parquet a confirmé l'existence, vise lui nommément les deux entreprises.
Le parquet de Paris relève sur le site rouennais de Lubrizol, classé Seveso seuil haut, "un réseau de caniveaux et un dispositif de confinement insuffisants n'ayant pas permis de collecter l'ensemble de la nappe enflammée" et l'absence de "dispositif de détection incendie sur les lieux de stockage extérieur" situé près des deux bâtiments qui ont brûlé.
La société appartenant au milliardaire américain Warren Buffet est aussi soupçonnée de n'avoir pas prévu "de moyens suffisants en débit d'eau pour lutter efficacement contre l'incendie" et de ne "pas avoir étudié les effets dominos" d'un potentiel sinistre sur les sites voisins, classés Seveso.
Des stocks non mis à jour et des points d'eau insuffisants
Normandie Logistique de son côté est mise en cause pour ne pas avoir "tenu à jour un état des stocks".
Elle n'aurait par ailleurs "procédé à aucune vérification des fiches de données de sécurité avant la réception des produits Lubrizol", selon le parquet.
L'entreprise de stokage ne disposait pas non plus de point d'eau "à moins de 100 mètres depuis l'accès extérieur de chaque cellule de stockage".
Le 23 octobre devant les députés, Jean-Yves Lagalle, directeur des pompiers de Seine-Maritime, avait expliqué avoir manqué d'eau le 26 septembre face à cet "un immense chaudron", un feu "hors norme" de "3 hectares de produits inflammables" sur le site Lubrizol, et de "7.000 m2 sur l'usine voisine".
Le 26 septembre, vers 02H30, une partie de l'usine Lubrizol et trois bâtiments de Normandie Logistique ont été ravagés par un gigantesque incendie, qui a provoqué un énorme panache de fumée noire de 22 km. Le sinistre n'a pas fait de victime.
Une usine réouverte en partie
Le 13 décembre dernier, l'usine SEVESO Lubrizol obtenait le droit de réouvrir partiellement, 2 mois et demi après l'incendie et la pollution qui a suivi. Le préfet de Seine-Maritime avait signé l'arrêté ce vendredi 13 décembre suite à l'avis favorable du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques.